/SURFACES SANS CIBLE/ After Photography avec Claude Lévêque et Constance Nouvel
Détourée, détournée, troublante et troublée, pixellisée, projetée, découpée, animée, manipulée, démultipliée, triturée voire démembrée… la photographie est une surface sensible qui sans cesse s’offre de nouveaux supports sur lesquels exister. C’est de cette surface photographique qui déborde tous azimuts que l’exposition « Surfaces sans cible » nous rend compte. A l’ère du smartphone qui dégaine ses belles images plus vite que son ombre, les étale grassement et les démultiplie sur les réseaux sociaux en un éclair, à l’heure où la photographie s’est démocratisée au point de faire de chacun de nous et d’un clic un photographe potentiel, "Surfaces sans cible" interroge la place de l’artiste. Comment se démarque-t-il dans ce flux permanent de clichés ? Dans ce déversement d’images charriant ses promesses de bonheur climatisé, où trouve-t-il sa place ? Comment résiste-t-il à l’aliénation généralisée qu’implique l’image véhiculée par les réseaux sociaux : la série de couchers de soleil d’Instagram, les vues de piscines et autres éclats festifs dont abonde facebook, pinterest et autres lieux d’auto-promotion. Loin des trop beaux clichés dévitalisés et produits en masse qui se répandent sur nos écrans, loin des milliards de vues splendides vidées de leur substance, en dehors de toute standardisation, une vingtaine d’artistes plus inspirés les uns que les autres et toutes générations confondues, présentent leurs images mentales sur les murs du 22Visconti. Les "surfaces sensibles" qu’ils donnent à voir, existent à part entière, sans destination marketing, c’est-à-dire sans calculer un éventuel cœur de cible. Cette image-là existe pour elle-même. Qu’elle soit photo-témoin ou photo-souvenir, abstraite ou bel et bien concrète, figée ou animée, qu’elle titille le nerf optique, plonge dans les fenêtres de nos écrans, invite à l‘introspection ou se mette à babiller… l’image sort de son cadre convenu, s’autorise des échappées virtuelles et réelles. Bref, en mouvement, voire en constante révolution, la photographie se réinvente à l’infini sans pour autant entrer dans la spirale capitaliste qui fait de nous tous de simples produits destinés à s’auto-consommer avec voracité… mais sans plaisir. Anaïd Demir
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