" Les fleurs courageuses " - Guillaume Talbi
Lauréat du Prix Yishu 8 2018, Guillaume Talbi présente au Nouvel Institut Franco-Chinois une série de sculptures inédites produites durant une résidence en Asie durant l’été 2023.
Du 8 février au 26 avril 2024
Nouvel Institut Franco-Chinois
Les fleurs courageuses
Dans la mythologie grecque Deucalion et sa femme Pyrrha sont les seuls survivants du Déluge décidé par Zeus. Pour repeupler la Terre, Hermès leur ordonna de se voiler la face et de jeter « les os de la Terre » par-dessus leurs épaules. Après avoir longtemps cherché le sens de ces paroles, ils comprirent que les os étaient les pierres qui couvraient le sol. Les pierres jetées par Deucalion se changèrent en hommes ; celles qui furent jetées par Pyrrha en femmes. Ainsi, la Terre se peupla de nouveaux humains plus courageux que les précédents.
Est-ce la réinterprétation du mythe de Deucalion et Pyrrha que Guillaume Talbi expose au Nouvel Institut Franco-Chinois de Lyon ? Comme le mythe, le nom de l’exposition « Les fleurs courageuses », qui est aussi le nom de la série de céramiques qui se découvre sur la table centrale, illustre la renaissance valeureuse de la nature. Des œuvres qui semblent jaillir des tréfonds de la terre ou des abysses, pour donner vie à des figures végétales et anthropomorphes.
Variations imprévisibles, réactions naturelles aléatoires
Comme l’encre qui coule sur le papier, les œuvres de Guillaume Talbi accordent une place au vide et au non maitrisable. Soumises à la réaction aléatoire de la terre face au pouvoir du feu et au temps long des variations de température, elles suivent l’ordre universel de la nature.
Guillaume Talbi s’en remet alors à l’imprévisible, avec fantaisie et légèreté. La cristallisation des émaux en gouttes figées sur les socles des sculptures donne le sentiment que les œuvres flottent au-dessus de la table. En lévitation, ce sont des pièces-monstres, des pièces-îles, des pièces-animaux marins qui émergent et qui semblent avoir été formées par les vents ou l’érosion des vagues. C’est une vision d’un monde en gestation avec ses constantes métamorphoses, que l’artiste figure.
Les sanguines
Comme les céramiques, il y a une dimension organique dans la série de sanguines sur le mur du fond de l’espace d’exposition. Serait-ce des cœurs et leurs rhizomes ? des chimères ? des méduses ? ou des comètes ? Les interprétations sont vastes. Ces formes hybrides flottantes sont la révélation même d’une nature aux multiples apparences et aux transformations incessantes.Guillaume Talbi laisse visible les traces de ses doigts sur le papier, il façonne. Son geste fait ressortir à nouveau son rapport charnel à la matière : à la terre, au bois, aux pigments broyés. Ce lien courageux qu’il entretient avec le vivant.
Ambrine Lazreug-Didier
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